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Discordance (octobre 2008)
Entretien avec Martin Duru réalisé par Discordance :

Immune. Un nom étrange, dont il est difficile de deviner l’origine au premier abord. Immune, c’est un groupe qui a su se trouver un univers paisible, aux antipodes du métal et d’autres styles bien agressif. Immune, c’est un monde posé, ou le temps ne semble pas défiler comme ailleurs et dans lequel il fait bon s’y perdre, tout comme dans Not Until Morning, ce deuxième album du groupe.

Mais avant l’analyse en détail de cette pièce musicale pleine de magie, découvrons un peu le groupe avec Martin, l’un de ses membres.

- Pourrais tu nous présenter le groupe ? Comment s’est faite la rencontre, comment en êtes vous arrivés à faire de la musique ensemble.

Dans Immune nous sommes 4 personnes : Jean Sébastien, son frère Julien, Garry qui est le chanteur, et moi même. Tout a commencé un beau jour de septembre. Jean Sébastien et moi étions ensemble au collège, et n’étions pas forcément très amis. Un jour, nous nous sommes croisés par hasard à la Fnac, et nous nous sommes rendus compte que nous regardions les mêmes CDs. Comme quoi la Fnac fait bien les choses. A partir de là, on a commencé à faire de la musique ensemble.

Après les années passant, Jean Sébastien a commencé à faire de la musique plus sérieusement. Il a d’ailleurs fait un album seul en 1999 sous le nom de Yawn. Et c’est donc après cela qu’il a eu envie de donner à son projet une nouvelle dimension, et il a appelé son vieux copain Martin. On a alors commencé à bosser ensemble, puis on s’est mis à la recherche d’un chanteur. Un ami commun nous a présenté Garry, puis Julien le frère de Jean Sébastien nous a également rejoint. On a donc commencé à faire des choses ensemble. On peut dire en gros que ça a commencé vraiment en 2001.

Et donc depuis 2001, qu’a t’on fait ? Et bien pas grand chose en fait (rires). On a fait un premier disque du nom de Sound Inside qui est sorti en 2006 sur un label belge du nom de Stilll (avec trois l oui), qui est spécialisé dans l’électro, ce qui nous convenait bien parce qu’il y avait pas mal de choses un peu électro sur ce premier album. Il a donc mis beaucoup de temps à sortir, car entre temps on a mis des morceaux sur des compiles... On a aussi fait quelques concerts, ce qui est assez compliqué pour nous, car nous venons de 4 villes différentes et pas vraiment proches.

Juste après la sortie de Sound Inside on s’est mis à travailler sur ce nouvel album qui nous a pris pas mal de temps. Jean Sébastien est à Lyon, Julien à Dijon, Garry à Angoulême, Moi à Paris. C’est forcement assez difficile de se réunir, donc c’est surtout Jean Sébastien et moi qui nous retrouvions pour bosser ensemble, les autres venant se greffer après. En fait, on va dire que la base de travail c’est Jean Sébastien et moi, même s’il faut mettre également beaucoup en avant le travail de Garry, qui est le chanteur et qui, comme tout les chanteurs a un ego incroyable. On pourrait par exemple parler de sa voix soyeuse et caressante, qui installe une ambiance ouatée, nous rappelant les souvenirs d’un autre temps. (rires)

- Combien de temps a pris la composition de ce nouvel album ? De quelle manière ça s’est passée ?

Et bien, ça a quand même pris pas mal de temps il faut l’avouer. Je ne sais pas si ça se sent vraiment, mais c’est un album ou il y en a un peu partout. Comme nous ne sommes pas vraiment de grands songwriters, c’est une manière de compenser. Par exemple ça part toujours d’une boucle de guitare très simple, ou alors d’une boucle de piano. Et après tout se joue sur l’enchevêtrement, pour créer une ambiance. Ce sont des morceaux qui sont très étirés, où tout prends le temps de se mettre en place au fur et a mesure. D’ailleurs on peut dire que ce sont des morceaux où les gens peuvent éventuellement se faire chier. Mais ça je n’aurais pas dû le dire parce que pour la promo, c’est très moyen... Donc je n’ai rien dis en fait...

Mais bon pour être sérieux, l’esprit est vraiment quelque chose de très simple à la base. Par exemple, un arpège qui tourne, un riff et après on vient rajouter plein de choses au dessus. Il y avait aussi un parti pris qui était de toujours s’appuyer sur des instruments organiques. Il y a de la vraie batterie, de la vraie guitare sèche.... Mais tout ça a été traité de manière électronique. Par exemple si on a un morceau de 8 minutes, l’arpège est mis en boucle, la batterie aussi et donc on vient faire des superpositions de tous ces éléments.

C’est un parti pris, car comme on n’est pas de très grands musiciens, c’est assez difficile pour moi de faire exactement le même arpège pendant 8 minutes... (rires). Bon après concernant les superpositions, on n’en fait pas trop car il faut que ça reste accessible quand même. Mais dans les faits purs, c’est comme cela que ça a été traité.

Je vois oui, et donc tu me disais que le premier album était plus électronique. Tu peux nous parler un peu des références/influences du premier album et du deuxième album ?

En effet, le premier album avait une tendance électro pop, avec un coté déjà étiré. Mais peut être avec plus de fond, avec une véritable recherche de planant. Pour le premier album, si on devait prendre des références pour cet album, ça serait plus Marc Hollis, Hank, tout ces groupes qui font attention à avoir un son très pur, mais sans se perdre dans l’esbroufe. Néanmoins, il y avait déjà dans le premier un coté acoustique, mais moins marqué. Après le groupe qui traverse vraiment les deux albums au niveau de l’influence qu’ils ont pu avoir sur nous, c’est Hood. Ça c’est la référence absolue, faut le dire parce que c’est le groupe préféré de Jean Sébastien quand même. Ne serait-ce qu’au niveau de la production, ça nous a beaucoup influencé. C’est une musique simple, fondée sur des arpèges très simples, tout en ayant une production qui est très léchée. Forcément, comme ils ont plus de moyens, ils peuvent plus s’investir dans la qualité du son, avec toujours la recherche de la petite boucle qui fait la différence. Le genre qui ne va faire tripper que les gens qui font de la musique. Tu vas écouter au casque, et tu vas te dire « Oh punaise à droite, y a eu un truc, oh punaise, là il y a 3 guitares qui viennent d’un coup ». Tu vois l’idée... C’est un peu ça qu’on a essayé de faire... On s’amuse comme on peut hein... (rires)

- Donc on parlait de production, au niveau de la mise en place de l’album, ça c’est passé comment ?

Déjà sur ce deuxième disque, on a essayé d’avoir un meilleur son, car le premier a quand mémés été fait assez à l’arrache, avec des morceaux enregistrés sur un 8 pistes, d’autres qui avaient commencé à être enregistrés en studio. Et au final le tout était loin d’être uniforme. Personnellement je pense qu’il y avait des morceaux qui n’étaient pas mal, mais qui péchaient vraiment par la qualité du son qui était loin d’être top. Le deuxième disque lui, a été entièrement fait en home studio avec notre matériel à nous, mais toujours avec le même matériel, pour chercher une vrai cohérence au niveau du son. Le premier album, on peut vraiment le voir, comme une collection de chansons assez disparates dans le son et les ambiances. Alors que le nouveau a vraiment été pensé comme un tout.

- C’est vrai qu’à l’écoute de l’album, j’avais presque l’impression d’assister à une histoire... Tout a donc été vu comme ça ?

Oui car il devait y avoir une cohérence minimale dans le son en enregistrant par exemple dans des périodes concentrées dans le temps. Par exemple, on a essayé d’enregistrer 5 jours de suite. Ça peut paraitre très con vu comme ça, mais quand tu fais ça, au bout d’un moment, tu viens à faire vraiment corps avec tes morceaux. Quand tu travailles un week-end ici et là, t’as pas le temps d’assimiler la chose. Mais comme là les morceaux sont plus longs, fallait qu’on vienne s’adapter à la chose, impossible de les travailler dans un laps de temps plus court. C’est des choix qui peuvent paraitre cons, mais quand tu fais ça, tu peux vraiment bosser ta musique.

Après il y avait aussi des choix en termes d’instruments, on voulait qu’il y ait de la vraie batterie, alors que sur le précédent, c’était des boites à rythmes. On ne voulait plus de guitares avec du delay, on voulait des sons d’orgues, on voulait donner plus d’importance à la basse. Là encore, ça peut paraitre bête, mais c’est comme ça que commence un album, en faisant tes choix. On voulait aussi un coté plus boisé, un coté rampant, donc on a pris de l’orgue. On ne voulait plus d’électro, donc on est revenu à des guitares classiques. On voulait aussi avoir des sons de cuivres, donc on l’a fait avec une direction bien définie.

Et oui, il y avait une vraie unité à la base. Une fois que cette base a été définie, on s’est mis au travail avec Jean Sébastien, sur quoi Garry est venu poser son chant, et après selon ses propositions on a retravaillé la chose… A moins bien sûr qu’il colle de suite à l’esprit du morceau, ce qui évidemment, se produit tout le temps. (rires)

- Qui écrit les paroles ? Garry ?

Pour cet album, Garry en a fait, j’en ai fait moi même, et on en a même fait à deux ? Ce ne sont pas des paroles dans lesquelles il faut aller chercher de grands messages. Je ne sais même pas si c’est intéressant de développer ce point. Généralement, il y a la démo de la chanson, Garry chante en yaourt, et après on essaye de trouver des mots qui s’adaptent à la musique. Il y a quand même des textes qui ont vraiment un sens, mais pas de thématiques particulières de développées. Bien sûr je pourrais te répondre en évoquant un texte précis, de se poser là et de te dire (prends un voix grave et sérieuse) « Oui, cette chanson vient traiter du thème profond de... » Et d’un autre coté, je ne veux pas tomber non plus dans le truc « Oui nous, on cherche la sonorité des mots, à recréer une harmonie intérieure au sein des lyrics », donc bon... (rires)

- En dehors des groupes qui vous inspirent, avez vous eu des influences plus cinématographiques ?

Certainement. Mais te dire lesquelles c’est autre chose... Jean Sébastien a fait des études de cinéma et pour son mémoire de fac, il avait fait un film dont il avait composé la musique avec son frère. C’était un film assez contemplatif, tourné en super 8, avec beaucoup de plans très lents, dans lesquels la caméra bougeait à peine, et où finalement il se passait peu de choses, mais en même temps, il se passait plein de choses. C’est à dire que, quand tu fais ça, le moindre petit mouvement parait tout de suite très important et donc c’est clair que oui, Jean Sébastien baigne dans un univers visuel. Et cet aspect va naturellement se traduire dans la musique d’Immune.

Si le morceau dure 6 minutes, il faut accepter que pendant 3 minutes, il y ait une base qui se pose lentement. Et si là on considère que la musique c’est uniquement fait pour danser et s’éclater, cela ne marchera pas du tout. On ne peut pas écouter
tout le temps Madonna non plus….

- C’est vrai que, de par le travail par couches, l’album a un caractère qui nous pousse à vraiment se poser pour apprécier…

Voilà. Et donc nous on a multiplié les arrangements pour cette raison. C’est ce que j’aime quand j’écoute un disque, de trouver au fur et a mesure des écoutes des éléments que je n’avais pas entendu avant. Exactement comme un album de Marc Hollis sorti en 1998. C’est un peu paradoxal avec la musique : il y a coté très vaporeux, qui ferait presque berceuse, mais en même temps si tu te concentres dessus, il y a plein de choses à découvrir. T’as l’impression que c’est un album hyper silencieux, où il se passe peu de chose, tu vas lui trouver des vertus apaisantes et si tu l’écoutes vraiment en détail, tu es fasciné par la pureté des sons et des choses que tu n’avais pas entendu avant. Il y a vraiment deux cotés, le coté relâché et le coté sophistiqué. Je ne suis pas en train de dire que notre musique est très sophistiquée mais j’ai le sentiment qu’à l’écoute, il se passe quelque chose.

Pour retourner sur la question du cinéma, nous on va beaucoup aimer un gars comme Tarkovski forcément, pour le coté très lent, très spirituel... C’est un cinéaste russe très célèbre pour ses plans séquences. Tout à fait le genre de films ou on réfléchit sur le rapport profond que l’Homme établit avec la Nature et avec Dieu. C’est une question qu’on se pose au quotidien, n’est ce pas ? (rires)

Et donc c’est vrai que certains morceaux pourraient être considérés comme les bandes sons de ce genre de films. Mais la encore on ne se dit pas qu’on est en train de faire une B.O. mais c’est a posteriori que tu réalises ça. Autant tu pourrais faire le choix musical d’un concept, autant là ça vient par hasard. Si tu cherches à faire telles choses dès le départ, tu te bloques. Il ne faut pas se dire d’entrée : « Tiens on va faire un album évanescent », il vaut mieux se le dire après.

- Comment se passe votre jeu sur scène ?

C’est quelque chose de très compliqué au point de vue logistique. Comme on habite loin des autres, quand on doit répéter, on prévoit cela 3 mois à l’avance. Avant à l’époque de Sound Inside, on a fait un certain nombre de concerts car on était à peu près rattaché à Dijon. On a donné notre premier concert en première partie d’un artiste qu’on adore qui s’appelle Matt Eliott et on a fait également la première partie de Bed. Pour les morceaux du premier album, on s’appuyait beaucoup sur des séquences programmées. Concrètement tu as un ordi qui tourne, tu as le batteur qui joue au casque avec un clic, ce n’est pas très ... sexy (rires). Mais ça permet que tout vienne au bon moment, sachant que tout ce qu’on voulait faire, c’était donner un minimum de densité à la chose et cela peut passer par plein de choses.

Mais avec le nouveau disque on va s’essayer de s’appuyer moins sur ça, car comme il a un coté plus organique, et comme le coté « séquences » reste un peu suspect du point de vue éthique, car ce n’est pas toi qui joue et qu’il faut quand même que le concert reste une « performance ». Ce qu’on essaye aussi de faire, c’est de compenser par une projection de film derrière nous, qui est le film de Jean Sébastien dont je parlais plus haut. Il s’appelle Head Light.

C’est quelque chose qui est assez en raccord avec qu’on fait, et comme on ne cherche pas à se mettre en avant dans le live, mais plutôt à créer une atmosphère à la fois paisible et avec un minimum d’intensité, ça convient vraiment. Cela dépasse même la performance de 4 mecs qui jouent ensemble. Le film permet d’aller du concert à une performance globale qui englobe à la fois l’image et la musique.

C’est comme quand U2 joue devant 80000 personnes et qu’il y a plein d’écrans partout pour un show incroyable. (rires) Non sérieusement, on va à l’essentiel sur scène, là où sur le disque t’as 7 arpèges de guitares, en live il n’y en aura qu’un, le plus marquant. Au fond, ça fait ressortir l’aspect nu de la chose, ce n’est pas désagréable

Mais pour résumer, pour nous, les concerts sont très compliqués, et c’est pour cela qu’on est à la recherche d’autres moyens de promouvoir notre musique.

- Cela pourrait éventuellement passer par des side projects ?

Voilà. Julien et Jean Sébastien ont d’ailleurs un projet parallèle qui se nomme Recorded Home. A la base, c’est un blog que Jean Sébastien avait fait avec un photographe. Il prenait une photo et Jean Sébastien faisait une sorte d’instantanée de musique par dessus. C’était quelque chose de principalement instrumental avec un parti pris lo-fi. Jean Sébastien a donc tiré de ce projet, un album que les lecteurs de Discordance peuvent acheter par exemple… (rires) Il a également voulu lui donner un prolongement sur scène, et on peut dire que d’une certaine manière cela se substitue à Immune. Dans Recorded Home ils sont trois, dont deux Immune. C’est une organisation plus souple qui leur permet de faire plus de dates. La promo d’Immune peut passer par là, ce ne sont pas les mêmes morceaux, mais c’est le même esprit. Avec encore la dimension des vidéos...

Parmi les autres projets dont je pourrais parler, on essaye de bosser sur l’illustration sonore. On collabore avec une boite qui s’appelle Justement Music et qui font des compiles du genre, compiles ambiant, compiles rock. On fait des morceaux spéciaux pour eux, ils mettent cela sur des compilations, pour ensuite démarcher des gens qui font de la pub. Cela nous permet d’avoir une approche différente de notre musique et de composer des choses qu’on n’aurait pas forcément composées. Par exemple, ils ont fait une compiles pop, et on a donc fait des morceaux qui donnaient envie de danser, ce qui est assez éloigné de ce qu’on fait. C’est intéressant parce que ça nous force à réinvestir notre petit savoir faire dans des styles de musiques nouveaux et en même temps ça permet de gagner de l’argent…

Parce qu’il faut savoir que quand tu fais de la musique comme nous, tu ne peux pas t’attendre à devenir riche (rires). Quand tu fais de la musique, pour en vivre, soit tu fais du commercial, soit tu fais des concerts, soit tu trouves autre chose. Il n’y a pas 36 solutions, mais bon c’est loin d’être une fatalité aussi. Il y a quand même tout le coté orfèvre qui est plus que plaisant.

- On va terminer en évoquant vos projets futurs…

C’est assez flou encore. On aimerait donner plus d’intensité à notre musique, et pas uniquement en live, mais aussi en studio, faire des choses plus rythmées car pour l’instant c’est très feutré. Et au bout d’un moment, il faut avouer que cela nous épuise un peu... Quand je réécoute l’album, je me dis qu’il y a peut être trop d’arrangements. Parfois un seul arrangement bien mis en avant peut faire la différence. Peut être que le mixage est un peu plat, que rien ne ressort vraiment. On aimerait aller vers du plus brut, du plus rapide, plus rythmé, en privilégiant un coté saillant.

Après en termes de compositions, ça pourrait rester quand même un peu mélancolique, voir un peu dépressif parfois. Même si on ne l’est pas dans la vie... Enfin en tout cas pas moi. En gros, il faut que nous capitalisions sur ce qu’on a fait, pour casser ce coté trop propret de notre musique. D’ailleurs on a déjà essayé de le faire sur les derniers morceaux de l’album, avec une sorte de déluge de batterie sur la fin. C’est un peu une manière d’annoncer ce qui viendra pour le groupe.

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Not Until Morning

En en attendant de ce qu’il adviendra du groupe, il serait sage de se pencher sur ce deuxième album. Not Until Morning pourrait se définir comme un joli voyage, une plongée lente et douce dans un univers de rêve, de mélancolie. Hello débute l’album en venant nous chercher langoureusement... Le morceau, étiré, assez lent, constitue une mise en bouche parfaite.

Au bout de six premières minutes et après une douce et relative apothéose, le morceau se termine, nous laissent en attente de la suite. Les atmosphères vaporeuses se suivent alors, installant un climax qu’on pourrait qualifier d’intrigantes rêveries. Les images se succèdent, le temps ne semble plus avoir d’importance.

Si les morceaux d’Immune sont effectivement lents, ils ne sont en aucun cas chiants. Et ce n’est qu’une fois confortablement installé, le casque sur les oreilles, les yeux fermés ou bien encore perdu dans la contemplation un paysage, que l’univers d’Immune saura se faire apprécier. Martin n’a pas menti, la voix de Garry semble sortir d’un autre temps, particulièrement sur Misplaced... Un titre qui nous donne l’impression d’assister à un conte, à une histoire lointaine et impalpable.

Et l’album se déroule encore, toujours avec cette sensation de planer, tout en s’arrêtant ici et là sur quelques titres en particulier.
Recorded Home, possible référence à un autre aspect de l’univers d’Immune.
Slow Backwards, et ses percussions hypnotiques en arrière fond.
Le final sur When We Faint, et son atmosphère délicieusement feutrée qui nous laisse redescendre sur Terre doucement...
Comme si le générique de fin se déroulait devant nos yeux...

Not Until Morning est un album doté d’un charme terriblement subtil. Tout en douceur, en retenue, et en intelligence, ces 8 titres sont à conseiller à un public patient, contemplatif, mais c’est un univers qui mérite également que d’autres oreilles s’y attardent, car il serait tellement dommage de se refuser un tel voyage.

A ceux qui tenteront l’aventure, je promets une belle histoire...

— -

En savoir +

Immune
Site officiel : http://www.immunemusic.com/
Myspace : http://www.myspace.com/immunemusicfrance

Recorded Home
Myspace : http://www.myspace.com/recordedhome
Le Blog musique / photo : http://recordedhome.hautetfort.com

Second Hand Music
Site officiel : http://secondhandmusic.fr.nf
Myspace : http://www.myspace.com/secondhandmu...




Next (24 avril 2008)
Entretien avec Jean-Sébastien réalisé par Next Music :


next : Comme beaucoup, je ne lis jamais les présentations des groupes sur leurs pages myspace ( trop long ...). Alors est-ce que vous pourriez présenter rapidement Immune et Recorded home à ceux qui nous lisent. Je crois que les deux groupes se connaissent, non ?

Immune est né à l'origine de ma collaboration avec Martin. Nous faisions de la musique ensemble au collège vaguement, et puis en 2000, j'ai réalisé un album solo sous le pseudo de Yawn. A l'époque mon disque devait sortir sur un petit label grenoblois, et j'ai pensé alors reprendre ces morceaux sur scène. Je n'ai fait aucun concert en réalité, mais c'est ainsi en cherchant un chanteur que j'ai rencontré Gary par un ami, et qu'avec Martin on a commencé à composer ensemble. Immune est né comme ça. Après Julien – mon frère – nous a rejoint naturellement quand on commencé à envisager de faire des live.
Pour ce qui est de « Recorded Home », c'est à la base un projet solo que j'ai mené pendant quelques mois avec un photographe. J'ai eu l'idée simple de faire un blog avec lui où une fois par semaine pendant 4 mois, lui livrerait une photo, et moi une musique qui devaient de se faire écho. Une fois cette petite expérience passionnante achevée, j'ai voulu perpétuer cet esprit « home made » sur scène, et j'ai commencé à bosser les morceaux avec Aurélien (ex-Cellar Door, avec qui j'ai joué pour quelques concerts). Après j'ai demandé à Julien de nous rejoindre et voilà !

- Immune vend son disque . Recorded home offre ses morceaux. Pourquoi ? C'est moins bien Recorded Home ?

Les morceaux de Recorded Home on été à chaque fois lors de l'expérience du blog enregistrés à l'arrachée pour conserver l'idée d'un instantanée d'une émotion, d'un instant. Donc c'est assez lo-fi, crade, et du coup j'ai préféré déposer le disque en téléchargement libre sur internet. En revanche, si des labels osaient sortir des choses de ce type, plus proche de l'essai, de la demo, je l'aurais fait… Mais je ne pense pas qu'un label souhaite faire ce genre de chose. C'est bien dommage d'ailleurs, et voir que les disques de Daniel Johnston ont vu le jour sur disque et par un label, je trouve que c'est un petit miracle ! J'apprécie beaucoup les demos, les brouillons, le moment où les morceaux tremblent un peu, qu'ils ne sont pas tout à fait sortis de leur coquille. Ils conservent un charme qui parfois disparaît quand tout est trop bien enregistré, lissé.
Immune et Recorded Home, ce n'est pas le même trip,et ça n'appelle pas les mêmes moyens de diffusions. Pour moi il n'y a pas un projet mieux que l'autre. Immune est juste plus présentable, sait se mettre sur son trente et un, et séduire l'auditeur. Tandis que Recorded Home se montre à nu, sans prendre soin de se mettre en valeur.

- La première question rituelle : est-ce que vous travaillez ou est-ce que vous vivez de votre musique ?

Non bien évidemment, et c'est bien dommage ! Pour l'instant on ne gagne rien du tout. Peut être que ça va changer, car nous allons essayer de travailler dans l'illustration musicale, de faire de la musique pour la pub, le cinéma,… Depuis peu, on collabore avec une boite d'illustration sonore dans ce sens, et on espère s'orienter là dedans pour espérer toucher un peu d'argent. Mais nous vendons très peu de disques, et ne faisons pas de concerts, donc il n'y a pas de miracle… Je suis caissier dans un cinéma d'art et essai à Lyon, Martin est pigiste, Gary est prof d'anglais, et Julien va tenter d'être prof de français.

- Deuxième question rituelle : votre position sur le téléchargement illégal ? (Immune est sur emule , j'ai regardé . Mais j'ai acheté l'album, hein).

Honnêtement je suis bien content que notre disque soit sur emule. Si ça permet de nous faire connaître c'est très bien. Pour ma part je télécharge beaucoup de musique, mais si j'aime le disque je l'achète. J'espère que les gens feront pareil avec notre disque. Pour moi je vois plus emule comme un moyen de découvrir de la musique. Après je ne me fais pas d'illusion… La plupart des gens téléchargent et point. Mais je préfère quand même ça à rien.

- Vous faites peu de concerts, non ? Est-ce par choix ou pour une autre raison ?

Non ça n'est pas tellement un choix. En fait, nous sommes tous dispatchés dans toute la France, et ça rend les choses compliquées ! Martin vit à Paris, Julien à Dijon, Gary à Angoulême, et moi à Lyon, donc voilà… Pour répéter c'est l'enfer pour trouver une date en commun, ça coûte cher à nous tous. De plus si on trouve une date ça veut dire qu'il faut que l'on demande un défraiement assez conséquent pour pouvoir jouer. Donc on joue très peu, sauf si c'est bien payé. Notre seule condition pour jouer est de ne pas devoir sortir de l'argent de notre poche.
Maintenant, pour la sortie de notre nouvel album au mois de juin, Recorded Home va se charger de faire la promo d'Immune et va jouer à sa place. Comme ça, Recorded Home joue, et Immune a l'opportunité de vendre des cds après les concerts. On va essayer dans cette configuration de faire quelques concerts en juin, notamment des shows case dans les Fnacs.

- Quelle est la différence entre la musique telle que vous la développez sur disque et celle que vous jouez sur scène ?

On essaie au maximum de copier les versions de l'album généralement. Du coup, on joue avec des séquences pour tous les morceaux electro. Nous ne jouons pas assez pour être vraiment bons et c'est dommage. Et comme nous avons généralement peu de temps pour préparer un set, on va au plus simple. Nos morceaux sont assez durs à transposer sur scène car ils jouent beaucoup sur les arrangements, des petites mélodies, ou des petits sons qui viennent et partent. En live, cette dimension se perd, mais du coup on essaie de compenser ce manque par plus d'énergie, de moments d'intensité.

- Comment faites-vous pour écouter un groupe aussi chiant que Sigur Ros ? Eh, les mecs, je vous rappelle qu'ils ont inventé leur langue ! On commence par eux et on finit par écouter du magma .....

On aime bien Sigur Ros oui. Après les goûts et les couleurs…

- Tiens, je sais pas si vous l'avez vu , mais vous vous êtes trompés sur votre page myspace . Dans vos groupes préférés, vous avez mis Mark Hollis . En fait c'est Talk Talk dont vous vouliez parler, non? Et encore, les deux derniers albums. Parce qu'Hollis, c'est super chiant, non ?

Là par contre le disque de Mark Hollis je l'adore et il fait vraiment partie des disques que j'aime le plus. Je trouve sa musique essentielle, émotionnellement très forte, délicate, précieuse. Tout est joué à fleur de peau, le tout est merveilleusement arrangé, et le son de ce disque me fascine. Il est rare d'entendre un disque aussi fort dans son parti pris artistique. Ca ne ressemble à rien d'autre, et ça c'est un critère essentiel pour moi. Combien de disques se ressemblent dans leur composition, leurs arrangements, leur son ? Ce disque ne ressemble à rien d'autre, et ça peut de groupes sont capables d'imposer une telle singularité.
Après pour ce qui est de Talk Talk, les 2 derniers sont nos favoris effectivement, mais j'aime quand même assez bien leurs morceaux pop années 80. Je les trouve sympas.

- Au fait, si je vous dis qu'en ce moment je sais plus trop quoi écouter, que plus rien ne me touche ( c'est pas le cas mais je suis prévoyant ), vous me conseillez quoi ?

Bah le Mark Hollis par exemple ! Il faut s'y plonger vraiment pour rentrer dedans, mais après on peut l'écouter en boucle, on ne s'en lasse pas. Sinon parmi mes disques préférés et que je conseillerais il y aurait : Hood (Rustic Houses…), Minus Story (No Rest For Ghosts), le deuxième album des Tindersticks, et Christophe dont je suis fan avec mon frère (mais là je ne forcerai personne à nous suivre) !

- J'ai rien à lire ... Même question.

Une personne qui a beaucoup aimé notre premier album, m'a dit que ça lui évoquait ses lectures de Murakami. Du coup, j'ai lu « L'oiseau à ressort » et « La ballade de l'impossible » qu'il m'a conseillé et j'ai vraiment adoré. Depuis j'ai lu un petit paquet de ses livres.

-Et un bon film ?

Récemment j'ai beaucoup aimé « There will be blood ». Sinon j'aime beaucoup Bergman, Rosselini, Tarkovski.



Infrarock (novembre 2006)
Interview de Jean-Sébastien réalisée en novembre 2006

Comment décrirais-tu l’univers musical d’Immune ?

Je dirais que notre univers est intimiste, mélancolique, mais je ne sais pas trop comment le décrire... C'est assez dur de parler de sa propre musique en terme d'univers musical. Je pourrais te citer nos influences, mais je ne suis même plus sûr que ça veuille dire quelque chose.


Immune avait déjà sorti un EP 7 titres en 2003. Quel regard portes-tu sur votre évolution artistique depuis la sortie de ce premier effort studio ?

De notre demo "Immune" à "Sound Inside" nous avons gardé un peu le même filon, à savoir créer une musique qui mêlerait idéalement la musique électronique et une musique plus acoustique. Je pense que l'on a réussi ce que l'on voulait faire, mais maintenant les rythmes electro, on en a marre. Quand je réécoute "you landscape" par exemple, je trouve la boîte à rythme très kitsch. Globalement je suis content de ces morceaux, car on a fait quelque chose de cohérent et de juste par rapport à ce que l'on cherchait à faire. Mais maintenant nous cherchons autre chose. De "Immune" à "Sound Inside", la vraie révolution pour nous a été l'ordinateur. "Immune" a été fait entièrement au 8-pistes numérique, et c'était quand même l'enfer de faire des ping pong et de faire les mixs en direct. Avec l'ordinateur, on a pu affiner les mixs et surtout beaucoup plus arranger les morceaux. Avec Martin on s'amuse pas mal à coller pleins de petits arrangements partout que personne n'entend. Sur le nouvel album que l'on prépare, on s'amuse à compter les pistes de chaque morceaux, et tous les morceaux ont au moins 40, 50 pistes, alors que quand tu écoutes, tu peux te demander où sont tous ces sons ! On adore être minutieux, et travailler la précision.

L’écoute de votre album, et tout particulièrement du titre « You landscape » m’a évoqué le travail d’Hood sans toutefois me donner l’impression que vous manquiez de personnalité et d’imagination. En quoi tes références musicales jouent un rôle dans le processus de composition ?

Maintenant la question des influences ne pose plus du tout. Je n'y pense plus quand je crée. Au début, j'étais tellement un passionné de Hood, que c'est vrai que je devais sans cesse prendre du recul pour me dire "là ça fait quand même trop Hood...". Et c'est vrai que mes arpèges en étaient très très proches. Maintenant je ne me pose plus ce genre de question. Peut-être parce qu’on a notre propre style désormais, ou parce que je me dis que je m'en fous. Quand on commence à créer, on copie la musique que l'on aime, et au bout d'un moment je pense que naturellement on trouve son truc, ce qui fait que l'on a un style.

As-tu des regrets vis à vis de Sound Inside, certaines choses que tu aurais aimé faire et que tu n’as pas pu réaliser ?

Oui, il y en a quelques-uns. Des regrets surtout liés à la manière dont on a enregistré le disque. "Thousand Leaves" par exemple n'a clairement pas le son qu'elle mérite. Elle aurait pu être bien meilleure, avec un vrai son de piano, un bon son de batterie. Et il y a aussi "Lighthouse", où je pense que l'on a raté la fin. On voulait faire une sorte de chœur mêlant beaucoup de voix, que ça soit envoûtant, et au final je trouve ça assez plat. Mais bon, dans l'ensemble j'en suis content, je suis satisfait. Maintenant ce qui m'intéresse c'est notre nouvel album. Je pense qu'il peut être excellent, et il ne tient qu'à nous qu'il le soit.

Comment se passent les concerts depuis la sortie de votre album ?

C'est simple, on en a fait aucun ! C'est dommage, vraiment, mais voilà. C'est très compliqué à plusieurs niveaux. Nous habitons tous des villes différentes et pour répéter c'est pas évident de s'organiser, et ça implique que si l'on a une date on doit demander un gros cachet pour nous défrayer. Notre label ne nous a pas donné de dates et nous n'avons pas de tourneur. Je regrette vraiment que l'on ne fasse pas de concerts. Pour Gary et moi c'est important, mais Julien et Martin ça les emmerdent un peu. Ils ont leurs vies, leurs cours, et trouvent que c'est une grosse organisation pour pas grand chose.

Qu’est ce qui est le plus épanouissant pour toi, la scène ou le studio ?

C'est de manière très évidente le studio, et même si l'on faisait davantage de concerts. Martin et moi composons quasiment tout, et on a adore arranger les morceaux ensemble. On compose chacun de notre côté, et ensuite on bosse ensemble. On passe un temps fou à enregistrer, arranger. On essaie des trucs, on expérimente pour trouver un son à nos albums. Sur celui que l'on travaille actuellement, on a enregistré beaucoup d'arrangements au dictaphone. Ca donne une couleur, une identité.

Sound inside n’a que quelques mois, et vous préparez déjà un nouvel album pour le courant de l’année 2007. La démo en écoute sur votre page myspace donne l’impression que vous cherchez désormais à rendre votre musique plus organique qu’éléctro. Peux-tu nous en dire plus sur ce futur album ?

Oui, l'electro il n'y en aura pas sur ce disque. L'instrumentation sera acoustique. Il y aura du vrai piano, du violoncelle, de la batterie jazzy, beaucoup de guitares folks et classiques, de l'orgue. Des sonorités assez différentes de "Sound Inside". L'album sera plus organique, moins froid, mais aussi plus sombre. De plus, je chanterai cette fois la moitié des morceaux. Ce qui donne aussi d'autres pistes. J'ai vraiment l'impression que l'on réalise ce dont on rêvait. De plus, les morceaux seront moins linéaires, moins basés sur une boucle, et aussi beaucoup plus arrangés. Je trouve nos nouveaux morceaux plus matures, plus profonds. Je pense aussi qu'ils seront plus intemporels et qu'ils seront plus difficiles à décrypter, qu'ils nécessiteront plusieurs écoutes.

Parlons un peu de ton blog Recorded Home. Tu as récemment lancé l’idée de réadapter les compositions de ce projet afin de les interpréter live. A quels types de changements doit-on s’attendre ? Les morceaux seront-ils plus peaufinés pour l’occasion ou tiens-tu à conserver leur coté brut et dépouillé ?


Les morceaux vont être réarrangés. Le fait de les retravailler avec Aurélien les bouleversent un peu. Il apporte ses idées, son jeu de guitare et au final ce n'est peut-être plus exactement les mêmes morceaux. Nous ne sommes que deux donc ça restera relativement dépouillé, mais les morceaux seront plus denses. Mais ce n'est pas facile d'adapter ces morceaux. Sur le Blog, ils tiennent de par leurs mélodies, mais aussi par leur côté lo-fi, leur fragilité. Sur le Blog, il y a beaucoup de souffle et les morceaux sont compressés en mp3. Je les avais écouté une fois sans la compression, et je trouvais que ça marchait moins bien pour certains d'entre eux. Le son est pour moi bien aussi important que la mélodie. Je compose toujours à partir de la matière du son, plutôt que la mélodie proprement dite. C'est le son de ma guitare amplifiée par exemple par un micro qui va m'inspirer une mélodie. Il me faut un son particulier à la base.

Est-ce que vous envisagez, toi et Jérôme, de reprendre les mises à jour du blog prochainement ?

J'en ai parlé à Jérôme il y a quelques temps. Il était partant et devait m'envoyer une première photo, mais il ne l'a toujours pas fait. Je ne sais pas exactement pourquoi... Peut-être ne prend-t-il pas de photos en ce moment. En tout cas, la dernière fois que l'on en avait parlé, on a évoqué le fait de reprendre qu'avec des photos en noir et blanc avec un format spécial. On ne veut pas refaire éternellement la même chose. En tout cas je pense que nous allons reprendre mais je ne sais pas quand.

Sur ton site figure une liste des albums que vous avez écouté et apprécié en 2005. Quels sont les cd qui t’ont particulièrement marqué cette année ?


J'ai beaucoup écouté le dernier Minus Story et le dernier Midlake. J'ai écouté aussi les deux derniers Lisa Germano, les deux Grizzly Bear, "Illinois" de Sufjan Stevens, tous les Spain. Je n'arrive plus exactement à voir les disques sortis cette année... J'ai bien aimé aussi le dernier des Strokes, le dernier David Pajo. Sinon j'ai découvert aussi des vieilleries : les Beach Boys, Disco Inferno,... Mais j'ai été déçu par des disques que j'attendais : le dernier Sparklehorse, le dernier Belle And Sebastian, le dernier Cat Power.

Peux-tu nous parler du dernier groupe à t’avoir mis une claque en concert ?

C'est Sigur Ros au Transbordeur à Lyon pour leur dernière tournée. C'était vraiment génial. C'était prenant, intense, émouvant, parfait en somme. Mais généralement, je ne suis pas un grand fan de concerts. Je préfère toujours les disques. Mais l'autre grand concert que j'ai vu, mais ça commence à dater, c'est Radiohead pour la tournée d'"OK Computer". Pareil, c'était génial.
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Debug
(septembre 2006)
Interview de Gary réalisée en septembre 2006

there are four persons in immune...
who writes the songs/how do you develop songs?


Well everybody writes for immune but Jean is the more likely to turn up with an great idea a rythm or a loop but some track can also evolve from a piano line from Martin (thousand leaves for instance). I usually write the vocals and the lyrics, but then, Jean also finds some nice vocal lines and will also be singing tracks on the next album...


do you meet in a cellar and rehearse or do you rather meet at home and record songs together?
(i am always curious as for me working alone is always me in front of my gear, recording/fumbling with a digital audio interface and adding live stuff and then doing manipulation of my recordings...)


We record in Jean's Small flat but never all at the same time, usually by pairs...as for rehearsing we're not a garage band but we do muster the energy to rehearse before a gig and when we want to try new songs live.


what inspires you to write songs?

that's a tricky question, generaly speaking "Life" I guess...a landscape can often be a source of inspiration . I think our aim is to create a painting with sounds,the lyrics drafting a tale but never unveiling it utterly... the listener is the one who ends the process of creation for he is the one who imagines and creates the final mental image of a song.

where does the melancholy come from?

Well, we're getting old so it's getting worse!!! I think you're bound to be melancholic and suffer the pang of nostalgia...We don't want to grow up probably and it's hard to face it day after day...however most of immune members love to be miserable. (that's a joke it sounds like Morrissey )

what do you do to earn a living?

Jean works in a cinema in Lyon, Martin spends most of days, recently, reading Nietzsche! Julien is a gigolo, and I'm most of the time a Substitute english teacher.

there are sideprojects... what kind of stuff is it? can you describe it a bit?


I have a side project called Absence which is an electro "sweet" PoP Lp...and Jean has an experimental solo project called "recorded home".


how did you meet stilll?


Well the story is I wanted to release the record on CCO cos I really love this label but then we met Alain that jean knew,while playing in Brussels, he had just started his Label "Stilll" and he was one of the first to support us.
We've also done a 5 track cd for Jason of "AI Records" who is also a great guy.

what are the next plans?

We're about to finish our second Lp right now and we'll obviously try to find a label or a structure to release it. Hopefully we'll be doing some gigs next year. I'm really looking forward to that.

any projects that you dream about, bands you'd like to tour with?

Being a friend and fan of Matt Elliot, I would love to tour with him even if it would certainly end in a Nightmare...and my dream is to play in Japan, i'd love to play there.

how important is playing live to you?

I love playing live even if I'm pretty nervous and hectic before getting on stage... meeting people,listening to other bands live is just sheer pleasure.

what are your favourite things? music, books, movies, food

I've just finished a biography of Byron and I've started Greil marcus's "Lipstick traces" for the third time I don't know if that's any good, we'll see...My summer was lulled by Tom Waits,Tim Buckley and some seventies Funk...I haven't watched a lot of movies recently, the last film I saw I really liked was Antonioni's "Profession reporter", Summer belongs to cricket...a great game.
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A Découvrir Absolument
(mai 2006)

Interview
Interview de Jean-Sébastien réalisée en Mai 2006

ADA : Quel chemin parcouru depuis vos premières démos !

Immune : Je ne sais pas vraiment… Mais d'un point de vue artistique, je pense que le meilleur reste à venir. Ma collaboration avec Martin est maintenant au sommet, et je pense qu'avec les nouveaux morceaux que nous travaillons actuellement, nous allons enfin réaliser l'album dont nous rêvions. Sound Inside est l'aboutissement d'une période de création de 2001 à 2005, et je pense que nous avons réussi notre pari. Mais notre horizon n'est plus le même et nous allons changer de direction. D'un point de vue de la reconnaissance de notre musique, le chemin parcouru n'est pas bien long en revanche... Enfin, il faut voir, peut être que la sortie de notre album sur le label Stilll va nous aider à prendre un peu d'ampleur. Mais être signer sur un label c'est quand quelque chose pour nous, car nous en rêvions.

ADA : La direction prise était-elle définie à l'avance. La compilation c'était le passage obligé ?

Immune : Non, il n'y avait rien de vraiment programmé. Si nous avions eu la possibilité de sortir un album avant, nous l'aurions fait, sans aucun doute. Les compilations ont été des opportunités pour nous faire un peu connaître. Mais notre rêve était de sortir un album sur un label.

ADA : N'avez-vous pas la volonté de plus en plus aller vers l'épure ?

Immune : Je ne suis pas si sure. Ce travail de l'épure est véritable sur Sound Inside, mais je ne suis pas sure que l'on continue dans cette voie.

ADA : Le nom de votre groupe exprime la douceur la mélancolie comme vos pochettes. C'est indubitable de votre musique ?

Immune : Oui, tout va dans ce sens. Tout cela est question d'intimité et de pudeur je pense. Nous désirons créer une musique belle et aimante, qui n'en fait pas trop pour séduire, mais qui, quand elle entre votre cœur demeure. D'ailleurs toutes nos pochettes de disque sont des photos de ma famille : de mon petit frère pour Sound Inside, et de mes grands parents sur notre demo Immune.

ADA : Quand on voit le nombre de groupes qui se calquent sur des idoles, ce qui fascine chez vous c'est d'avoir explosé cette emprise. Vous avez lutté contre cela ou tout est allé de soit ?

Immune : Je suis un fan invétéré de Hood, et il faut bien admettre que mes premiers morceaux étaient du plagiat de ce groupe. Leurs arpèges de guitare m'ont définitivement marqués, et aujourd'hui encore j'en ressens l'influence. Mais bon, c'est comme ça, et il ne faut chercher à tout prix à être original. Il faut faire la musique la juste par rapport à soi, et être le plus honnête possible. Voilà ce qui me semble être le plus important. Après, tous les groupes sont influencés par leurs aînés, et c'est bien normal. Ce n'est qu'avec le temps que l'identité d'un groupe se dégage complètement.

ADA : Pourriez-vous un jour écrire en français ?


Immune : Non, pas dans le cadre d'Immune. Ca ne collerait pas. En revanche, je me vois bien un jour faire un disque en solo en français. Mais je pense que ce n'est pas encore pour demain.


ADA : Lâchez-vous la tension palpable sur scène comme peut le faire encre ou bed, ou restez-vous dans les rails sans déstructurer vos compositions ?

Immune : On essaie de faire en sorte que les concerts soient plus rock. L'omniprésence de la batterie déjà ajoute de la puissance par rapport au disque. Mais je pense que nous ne sommes pas très bons en concert. Nous sommes définitivement plus un groupe à albums. A cause de notre éloignement géographique (Martin est à Paris, Julien à Dijon, Gary à Saint Claude dans le Jura, et moi à Lyon), nous ne progressons guère car on ne répète presque jamais. C'est un peu dommage, mais ce qui nous plait le plus est de réaliser des disques.

ADA : A propos de la scène votre pire et votre meilleur souvenir ?

Immune : Le pire c'est indiscutablement celui à Lyon que l'on a donné pour la manifestation " Les Quais des Guinguettes ". C'était en plein air, en plein milieu d'après midi devant une dizaine de personnes assises qui mangeaient des frites. Juste à côté de nous, il y avait un groupe salsa qui jouait et qui nous couvrait sur les morceaux calmes. C'était affreux, d'autant plus que je joue de la batterie au clic par-dessus les séquences électro... C'était tout bonnement insupportable. On avait rien à faire là. C'est comme si on avait fait la fête de la musique à côté d'un groupe de hard. Ce n'est pas possible pour notre musique. En revanche, notre meilleur souvenir c'est notre première partie de Matt Elliott à Dijon pour le festival Novosonic. C'était dans un théâtre, les gens étaient assis et à l'écoute. Les conditions idéales en somme. En plus, faire la première partie de Matt Elliott, c'était pour nous un honneur puisque on est tous des grands fans.

ADA : La possibilité comme on put le faire Mansfield Tya, Rodolphe Burger ou Angil de s'attaquer à la bande son d'un film muet vous attire t'il ?

Immune : Oui ça nous tente beaucoup, et on a bien envie de faire ça en live un jour. J'ai d'ailleurs réalisé un film en super-8 " Headlights " sur lequel j'ai fait la musique avec mon frère Julien. Ca a été une très bonne expérience. J'espère qu'on renouvellera ça un jour en groupe.

ADA : L'éloge de la lenteur, l'amour du silence. Immune se retrouve dans ce genre d'idées ?

Immune : Assez oui. Mais ce ne sont pas non plus nos mots d'ordre.

ADA : Pous pouvez nous parler de vos projets parallèles ?

Immune : Pour ce qui est de la musique, Gary joue dans Absence, duo qui lorgne du côté des Smiths, Sonic Youth. Pour ma part, je tiens avec le photographe Jérôme Dittmar le Blog Recorded Home où plusieurs fois par mois on se concerte pour mettre en ligne un morceau et une photographie qui se font écho. Après ça, Julien et Matin écrivent. Julien a écrit " Alfred Le Funambule " et Martin " La Monnaie Du Pape ", et tous les deux cherchent actuellement un éditeur. De mon côté je réalise de temps à autre des films courts en super-8.

ADA : Quelle est votre position face aux nouvelles licences, aux téléchargements, à la nouvelle donne de l'Internet ?

Immune: Je ne suis pas trop au courant de tout ça… Donc je préfère ne pas trop m'étaler là-dessus de peur de dire des bêtises.


ADA : En dehors des Mark Hollis, Arab Strap ou autres Radiohead et Sigur Ros qu'est-ce-qu'écoute Immune en cachette ?

Immune : Pour ma part, j'écoute énormément de musique et guette toujours les nouveautés. En ce moment j'écoute beaucoup le dernier album de Minus Story que je trouve fabuleux, et le disque de Grizzly Bear Horn Of Plenty. Mais j'écoute aussi les derniers Dominique A, Morrissey. Pour ce qui est de ce que j'écoute en cachette, ce serait Alain Souchon, Christophe, des choses comme ça. Martin ne suit pas l'actualité et se passe en boucle Hood et Matt Elliott, mais écoute aussi des trucs comme Souchon, Coldplay, Snoop Dogg,… Julien écoute des nouveautés et aime bien Herman Dune, Cocorosie, Arab Strap,… Et Gary écoute Sinatra, Morrissey,…

ADA : Avez-vous des envies de reprise pour la scène par exemple ? Pourriez-vous vous imprégner d'un autre univers ?

Immune : A un moment donné, on a voulu reprendre la musique de Céline Dion pour Titanic. Mais on ne l'a pas fait, et on aurait eu trop peur de se faire jeter… Cela dit, on est persuadé que ce morceau arrangé autrement pourrait être très bon. Et pour avoir entendu Gary le chanter en karaoké, je peux affirmer que ça aurait pu être bon. Ce morceau est finalement assez proche mélodiquement d'un morceau de Sigur Ros qui apparaît sur la B.O de Angels Of The Univers.

ADA : Vous souhaitez donner une suite autre que sur le net au Blog recorded home ?

Immune : Oui, et j'y travaille actuellement. En fait, j'ai le projet de poursuivre l'idée de ce Blog sur scène en reprenant les morceaux du Blog en les accompagnant de film super-8 qu'un ami projetterait en même temps. Je travaille sur ce projet live avec Aurélien de Cellar Door, et on cherche actuellement un clavier et un violoncelliste pour nous accompagner sur scène. Après, je pense que de cette expérience un album naîtra. Je pense garder les meilleurs morceaux, les retravailler, et les sortir sur disque.

ADA : Est-ce un hasard mais les quatre photos montrant les membres du groupe vous montrent les yeux fermés. Vraiment planant Immune ?

Immune : Oui c'est du pur hasard. Il nous fallait des photos pour mettre sur le site, et on a mis ce que l'on a trouvé… ADA: Votre playlist du moment ? Immune: - Minus Story - No Rest For Ghosts et The Captain Is Dead, Let The Drum Corpse Dance - Grizzly - Bear Horn Of Plenty - Daniel Johnston - Discovered Covered - Sparklehorse - Tous les albums.
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Immune par Immune
Réalisé en Mai 2006, à l'occasion de la sortie de Sound Inside.

You Landscape

C'est un peu notre single, si on peu dire… Simplement car c'est le seul morceau un peu entraînant. C'est un morceau que je devais chanter au départ, et puis Gary a insisté pour le chanter. C'est loin d'être notre meilleur morceau à mon sens, mais c'était important d'avoir en ouverture un morceau simple qui ne soit pas trop difficile d'accès. Les paroles écrites par Martin évoquent le concept de " visagéité " chez Deleuze, ce que je trouve assez drôle. Ca raconte en gros la métamorphose d'un visage en paysage. Tout un programme !

Acoustic Memories

C'est l'un de mes morceaux préférés : simple, doux et aimant. Là aussi je devais le chanter à la base, mais quand on a commencé à le répéter pour les concerts, Gary a tenu à ce que ça soit lui qui le chante. J'aime bien les arrangements, le mélange des sonorités entre le piano, le rythme electro et le violoncelle.

Through Tides

Ce morceau commence a bien daté, puisqu'il figurait sur notre première demo. C'est l'un des morceaux que les gens préfèrent. Il ressort souvent dans les chroniques. Pourtant, je pense que l'on a raté un petit quelque chose avec ce morceau. Il y a un problème de basse, d'intensité. Peut-être que l'on aurait du rajouter une autre batterie, rajouter des sons, je ne sais pas… Mais il y a un problème de son pour moi.

The Same Old Throb

C'est le seul morceau instrumental de l'album. Je pense que les gens n'y prêtent pas trop d'attention, car on ne nous en parle jamais… C'est dommage car je le trouve vraiment bon, et assez original. Il a une noirceur et un côté lyrique à la fin que j'aime vraiment.

Lighthouse

C'est mon morceau préféré, et le seul morceau où Julien ait participé au stade de la composition. Les arpèges sont de lui, et je les trouve assez originales. C'est aussi le dernier morceau que l'on ait composé pour l'album. Ce que je trouve très réussi sur ce titre c'est les mélanges de grains entre les arpèges de guitare sèche, la programmation electro et le piano. Cela dit, la fin n'est pas à la hauteur de ce que l'on espérait. On aurait aimé mieux travailler les chœurs de la fin, mais nous n'y sommes pas vraiment parvenus…

Streams Go Blind

C'est l'un des morceaux les plus simples que l'on ait composé à mon goût. L'arpège est évident, les arrangements limpides. Ce morceau fait du bien sur le disque. Il est plus chaleureux, et porte de manière plus directe. J'aime beaucoup dessus le mélange des voix de Gary, je trouve ça simple et émouvant.

Headfirst

Voilà le morceau qui définit le mieux ce que nous avons voulu faire sur Sound Inside. Il est acoustique avec son piano et sa batterie au début, et devient de plus en plus electro au fur et à mesure. C'est aussi le morceau le plus complexe du point de vue de la structure. Je pense qu'il demande plus d'effort pour l'appréhender.

Wandering Clouds

C'est le morceau préféré de Martin, mais aussi de Matt Elliott. Mais généralement, il gonfle plutôt les gens. C'est un morceau froid et pur. Il est très minimaliste et très mesuré. Je pense que c'est l'un des morceaux les plus singuliers que l'on ait fait.

Thousand Leaves

C'est un morceau de Martin à la base. C'est le plus vieux de l'album, car Martin le traîne depuis 8 ans peut-être ! La mélodie et les arrangements sont vraiment très beaux, mais on a pas réussi à lui rendre vraiment justice. Le son général est moyen et je pense qu'avec plus de matériel on aurait pu arriver à mieux. C'est un peu dommage.

Father's Falling

Ce morceau est aussi très vieux, car je le traîne depuis le lycée je crois. Il faisait aussi parti de notre première demo, et notre label a demandé à ce qu'il réapparaisse sur Sound Inside. On a juste réenregistré le chant depuis. C'est un morceau que j'aime bien car il a un côté planant, libéré que les autres morceaux n'ont pas. En tout cas, c'était le morceau idéal pour clôturer le disque.

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01 audio-video
(aôut 2005)
Interview de Jean-Sébastien réalisée en Août 2005

Q. : "Immune", le groupe, est né en 2001 mais depuis combien de temps vous connaissez-vous et comment est née l'envie de créer un groupe ?


R. : Julien et moi sommes frères donc nous nous connaissons depuis toujours ! Sinon j’ai rencontré Martin au collège, car nous étions dans la même classe. On n’a commencé à se fréquenter qu’aux premières années du lycée en faisant un peu de musique ensemble. A partir de là, on n’a jamais cessé de travailler ensemble. Nous avons rencontrés Gary plus tard, en 2000. On cherchait un chanteur pour un projet que je menais alors, et c'est par l'intermédiaire d'un ami commun que l'on s'est rencontré. L'envie de créer un groupe n'a pas été pensée du tout. Nous faisions tous de la musique depuis longtemps et Immune est né naturellement des cendres de mon ex-projet solo auquel se sont ajoutés Martin, Julien puis Gary.

Q. : Pourquoi ce choix de nom : Immune ?

R. : C’est Martin qui en a eu l’idée. Ce nom sonnait bien et c’est essentiellement ce qui nous a poussé à le retenir. Ce mot est court, simple et la signification en plus nous plaisait bien ...

Q. : Vous êtes tous assez jeunes. C'est quoi la moyenne d'âge ?

R. : Gary est le plus âgé (28 ans) et Julien le plus jeune (21 ans), sinon Martin et moi avons 25, 26 ans. Le groupe tourne donc autour des 25 ans.

Q. : Vous êtes des musiciens autodidactes ou vous avez une formation musicale ?

R. : On a tous suivi des cours à un moment donné, mais rien de vraiment sérieux ... Cela s’est limité à un an, voire deux ans. Nous sommes autodidactes et pour moi c’est une vraie fierté ! Je ne regrette pas du tout de ne pas avoir suivi de cours régulièrement. J’ai le sentiment d’être plus libre ainsi, d’être capable de mieux expérimenter.

Q. : Entre le moment où le groupe s'est formé (2001) et le moment où vous avez sorti votre premier album (Immune - Février 2004), il s'est passé pas mal de temps, ce qui laisse à penser que vous avez pris votre temps et laissé mûrir des choses non ?

R. : Oui, pas mal de temps s’est écoulé car nous voulions que "Immune" sonne le mieux possible. On a mis de côté des morceaux et sommes revenus de nombreuses fois dessus. Après, ce qui nous a aussi pas mal retenu, c’est que, pendant ces années, Gary habitait Angers et que les autres membres étaient plutôt vers Lyon, Dijon. Mais nous sommes aussi lents et perfectionnistes !

Q. : Par contre, à partir d'"Immune", tout semble s'accélérer : 2 dates de concert fin 2004, à peu près un concert par mois en 2005 et la sortie en Avril de "Sound Inside" ... Vous avez trouvé vos marques et un rythme de croisière on dirait ?

R. : Depuis 2004 et notre premier concert, c’est vrai que les choses se sont accélérées. Tout est parti de Radio Campus Dijon qui nous a demandé de faire la première partie de Matt Elliott à Dijon pour le Festival Novosonic. Nous n’avions alors jamais répété ensemble, et donc le fait d’avoir une date de concert programmée nous a fait rebondir. Après ce concert, on a pu alors participer aux tremplins du Printemps de Bourges, des Eurockéennes, et à d’autres. On a eu pas mal de chance et je pense que l’on s’en est bien sorti vu l’expérience que nous avions alors de la scène. "Sound Inside" a été composé assez vite par rapport à "Immune". Je ne saurais pas expliquer pourquoi. Là, on travaille sur le troisième, mais vu comme c’est parti, j’ai bien peur que ce disque ne voit pas le jour d’ici un petit bout de temps ...

Q. : "Sound Inside" est un album très abouti. Les arrangements sont superbes. Les critiques ne s'y sont pas trompé : je n'ai vu que des chroniques élogieuses ... c'est bon signe dans votre effort de prospection auprès des professionnels, non ? D'ailleurs, des rumeurs circulent sur la toile comme quoi votre signature avec un label serait imminente : vous confirmez ? Qu'en est-il exactement ?

R. : On est très content de l’accueil de notre disque par les critiques. Ça a été une très bonne surprise ! C’est motivant et encourageant. Cela donne envie d’aller plus loin, de progresser. Sinon, oui effectivement, nous devons signer sur un label très prochainement. Je ne préfère pas trop m’étaler sur la question tant que rien n’est signé ... Je dirai juste que nous avons eu trois propositions : de deux labels belges et d’un allemand. Dès que les choses seront plus engagées et que la signature sera faite, nous l’annoncerons sur notre site. En tous cas, nous sommes très heureux d’avoir trouvé un label. C’était un peu notre rêve, et du coup c’est assez étrange de sentir que c’est sur le point de se réaliser.

Q. : J'ai lu quelque part, qu'un des avantages, pour vous, du home studio, c'était de pouvoir contrôler votre travail de A à Z. Si vous passez sur un label - ce que l'on vous souhaite bien sûr - ce dernier aura nécessairement une influence dans la prise de décisions. Comment comptez-vous modifier votre façon de travailler ?

R. : Pour l’instant, il n’y a pas eu de problèmes majeurs avec les labels ... Ceux avec qui nous avons pu aborder le sujet nous ont plus fait des suggestions qu’autre chose. Tout peut se négocier et nous ne sommes pas obtus. Un label a un problème avec l’ordre des morceaux et deux morceaux, l’autre avec un autre titre ... Nous verrons, mais je ne me fais pas trop de souci là-dessus.

Q. : Au fait, vous êtes plutôt Mac ou PC ? Et avec quels logiciels travaillez-vous ?

R. : On travaille sur PC et avec Cubase SX. Mais notre premier album "Immune" a été enregistré sur un 8-piste numérique.

Q. : Actuellement, sur votre site Web, vous offrez quelques extraits de morceaux du dernier album à télécharger en MP3, certains morceaux sont même disponibles en entier. Vous participez aussi régulièrement à des compilations téléchargeables gratuitement : pour vous, Internet est un bon vecteur de promotion pour vous faire connaître ?

R. : Oui, Internet est idéal pour ça. Notre site est assez visité et ça nous permet de faire découvrir notre musique à des personnes de l’autre bout du Monde, et ça c’est assez excitant. Je sais que notre site est visité à 50% par des américains par exemple. Sans Internet, vraiment beaucoup de portes ne se seraient pas ouvertes à nous !


Q. : Quelle est votre position vis à vis des téléchargements pirates sur le Web ? Est-ce que vous pensez que ça peut être gênant pour un jeune groupe comme Immune ou bien que les majors ont monté le truc en épingle parce que c'est surtout gênant pour eux ?

R. : Honnêtement, je ne sais pas trop quoi en penser ... Je ne sais pas si c’est un handicap ... Personnellement, je télécharge beaucoup pour découvrir de nouveaux groupes. Mais après, si un album me plait, je me pousse à l’acheter. Je me doute bien que tout le monde ne fait pas ça et donc du coup, je ne sais pas trop ... mais au fond de moi j’aurais plutôt tendance à penser que c’est une bonne chose.

Q. : Le gros handicap des groupes français pour se lancer dans la pop, c'est souvent la langue. Le français pour la pop, c'est vraiment pas terrible ... hors de l'anglais, point de salut mais les français chantant en anglais, ça fait souvent marrer ... Vous, vous vous en sortez plutôt bien : c'est quoi votre secret ?

R. : Gary est bilingue ! Donc ceci explique cela !

Q. : Parmi vos influences revendiquées, on trouve Mark Hollis, Sigur Ros, Arab Strap, ... tous anglo-saxons. Il y a des gens en France dont vous vous sentez proches ?

R. : Oui, il y en a. Moins certes, mais il y en a ! On se sent assez proches de Bed, Cyann And Ben, Playdoh, Sébastien Schuller ou encore Syd Matters. Pour ceux qui chantent en français, on aime bien Dominique A, Bashung, Murat, Françoiz Breut ... Mais c’est vrai que nos influences sont avant tout anglo-saxonnes.

Q. : Et la scène Lyonnaise actuelle, elle est comment ? Y'a des trucs à découvrir ?

R. : Je la connais assez mal finalement mais il y quelques groupes que j’aime bien : Cellar Door (groupe avec lequel je joue sur scène), May Fly, Moonchild ... Après, je ne vois rien d’autre, mais je ne suis pas très curieux non plus ... Et il faut reconnaître aussi qu’en général nous sommes assez difficiles.

Q. : Deux d'entre vous ont d'autres projets musicaux (Cellar Door et Yawn pour Jean Sébastien Nouveau, The Absence pour Gary Soubrier) en parallèle d'Immune. Vous gérez ça comment ?

R. : Immune reste la priorité, mais pour l’instant l’un n’a jamais gêné l’autre ...

Q. : En février (2005), vous parliez d'enregistrer un mini album (quasiment prêt) après la sortie de "Sound Inside". Où en est ce projet ?

R. : Disons que pour l’instant il est mis de côté ... Il n’est pas perdu et nous retravaillerons dessus à un moment donné. On pensait le réaliser juste après "Sound Inside" pour marquer une pause en faisant quelque chose de plus simple et différent. Mais en réalité, on s’est remis directement à composer de nouveaux morceaux pour le prochain album. On a déjà quelques demos et du coup le mini album est mis de côté pour l’instant. Mais nous tenons à ce projet et il sortira, ça c’est sûr, après quand, nous ne pouvons pas le dire ...

Q. : Pourra-t-on vous voir en concert en région parisienne un de ces jours ?

R. : On l’espère ! On ne demande que ça de faire des concerts ! Mais c’est vraiment difficile. Chercher des dates est boulot à temps plein. C’est insupportable comme travail ! Il faut essuyer les refus, insister et insister encore. A la rentrée, je pense que nous allons partir en quête d’un tourneur si jamais notre label ne s’en occupe pas totalement. Mais si quelqu’un à un plan à nous proposer à Paris, on saute dessus !

Q. : Votre playlist favorite ?

R. :
* Sigur Ros : ( ) (album absolument fabuleux)
* Hood : C’est mon groupe préféré ... Depuis leur album "Rustic Houses Forlorn Valleys", je suis un fan invétéré
* Mark Hollis et Talk Talk : Spirit Of Eden et Laughing Stock
* Matt Elliott : Ses deux derniers disques sont merveilleux
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Le Bien Public
(juillet 2005)
Quartier Libre . n°244 . 1er au 07 juillet 2005

IMMUNE par IMMUNE

On les a croisés à l'occasion des tremplins des Eurockéennes et du Printemps de Bourges. Depuis, grâce à une pop subtile mariant électro et acoustique, Immune a gagné ses galons de groupe régional de référence. Aujourd'hui, en passe de signer sur un label étranger, Immune revient en huit mots clés sur la genèse du groupe, par la voix de son principal compositeur, Jean-Sébastien Nouveau.

RENCONTRE
« Immune est né d’un projet solo que je menais juste avant Immune. En 2000, je venais d’achever un premier album, quand je me suis mis à rechercher des gens pour créer un groupe et jouer ces morceaux en live. Naturellement, Martin (guitares, piano, claviers)- avec qui je fais de la musique depuis le lycée - m’a rejoint, puis Julien (basse et violoncelle) – qui est mon frère – et ensuite, Gary (chant, guitares), que j’ai rencontré par un ami commun. Au final, on n’a jamais fait de concert, ni aucune répétition, mais Immune s’est formé ! On a fait une demo 5 titres sous le nom de Yawn et puis peu de temps après, Yawn s’est transformé en Immune ».

INFLUENCES
« Nos influences se situent plus du côté de la pop et du post-rock que de la musique electro, que nous connaissons finalement assez mal. Pour citer nos plus grosses influences, il y a Mark Hollis, et Robert Wyatt, qui représentent pour nous une sorte d’idéal esthétique. Sinon, on se sent très proches de groupes comme Hood, Sigur Ros, ou encore Bed ou Sébastien Schuller pour citer quelques français. Mais la liste pourrait être très longue ! (Matt Elliott, Radiohead, Tindersticks, Piano Magic…)».

SOUND INSIDE
« Sound Inside est notre premier véritable album. On avait déjà réalisé un premier mini-album 7 titres Immune en 2003, mais Sound Inside sera le premier album officiel du groupe puisqu’il sortira courant de l’année prochaine sur un label. Ce disque est pour nous une sorte de compilation des meilleurs morceaux d’Immune depuis sa formation. Ce disque est très important pour nous car il est le premier, et aussi parce qu’on pense qu’avec lui, nous avons assez bien réussi à nous affranchir de nos influences pour créer une musique qui nous est propre. Je pense que notre formule electro-pop est assez personnelle pour se démarquer de ce qui se fait dans le genre ».

HOME STUDIO
« Pour l’instant nous n’avons jamais enregistré en studio. Nous enregistrons toujours dans nos appartements, que ce soit à Lyon, Dijon ou Saint Claude. Ca nous offre une plus grande liberté, et ça nous permet vraiment de ne pas fractionner les phases d’écriture et d’enregistrement. Après, on enregistrera sans doute en studio, un jour, si l’opportunité se présente. Mais on tire un réel plaisir à tout faire nous-même, à tout contrôler du début à la fin. Il y a vraiment une grande satisfaction à tout faire du début à la fin !»

VIDEO (OU CINEMA)
« Je suis en DEA cinéma à Lyon, et on aimerait vraiment bien projeter des films super 8 pendant nos concerts. Mais ça demande beaucoup de travail si on doit faire les films nous-même en plus de la musique. Je pense qu’à long terme ça arrivera quand même, car on garde cette idée en tête. On a des idées de films pour quelques morceaux, mais ce n’est pas encore à l’ordre du jour. Cette année, j’ai aussi rencontré à la fac un ami (Jérôme Dittmar) qui a réalisé un DVD à partir de notre premier album demo « immune ». Le résultat est intéressant car ça ne correspond pas du tout aux images que l’on aurait mises sur notre musique. Jérôme a mis en images notre musique à partir de films super 8 qu’il a tournés durant un voyage à Tokyo. Le DVD devait sortir sur un petit label belge, mais pour des histoires de droits, ça parait aujourd’hui très compromis…»

NOVOSONIC
« Jouer au Festival Novosonic l’octobre dernier a été une vraie chance ! C’était notre tout premier concert, et on ne pouvait rêver mieux que de faire la première partie de Matt Elliott, ainsi que de jouer dans le même festival que Cyann and Ben, Shannon Wright, ou encore Piano Magic. On doit beaucoup à Radio Dijon Campus, Audio Bazard et l’Atheneum ! Sans eux, on n’aurait certainement pas pu participer aux tremplins du Printemps de Bourges et des Eurockéennes ».

LABEL
« Cette année a été fructueuse, et si tout va bien, nous devrions signer sur un label dans le mois qui vient. Nous avons eu trois propositions, provenant de deux labels belges, et un allemand. Pour l’instant on examine les propositions, et puis nous allons nous engager. Nous attendions ça avec impatience, et nous sommes très heureux que trois labels s’intéressent à nous ! Pour l’instant je ne peux guère en dire plus, même si nous avons notre idée sur le label vers lequel nous allons nous orienter…».

PROJETS

« Nos projets pour la rentrée sont de pas mal tourner, et d’accompagner au mieux la sortie de l’album. Nous avons commencé aussi à travailler sur un nouveau disque qui commence à se dessiner petit à petit. Il sera certainement plus jazzy, plus acoustique et plus sombre, mais nous verrons en composant quelle orientation prendra le disque.
Gary et moi avons 2 projets parallèles. Gary joue au sein du duo The Absence qui est assez rock, et qui peut faire penser aux Smiths, Sonic Youth. Pour ma part, j’officie au sein du groupe lyonnais Cellar Door où je suis juste instrumentiste pour les concerts. Cellar Door est une sorte de mélange de folk et d’electro ».
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Propos recueillis par Pierre Carlet



Infratunes (février 2005) <

Interview de Jean-Sébastien (Février 2005)

Entrons directement dans le vif du sujet : parmi vos influences, vous citez plusieurs artistes (Sigur Ros, Mark Hollis, Arab Strap, etc.). Qu'est-ce qui, selon vous, fait l'originalité d'Immune?

Nous citons souvent Mark Hollis, Arab Strap, Hood, Sigur Ros ou Matt Elliott, pour donner une idée de ce à quoi ressemble notre musique à quelqu'un qui ne nous connaîtrait pas. Mais donner nos influences est aussi un bon moyen de nous inscrire dans une lignée, une "famille" de groupes à laquelle nous pourrions appartenir. Mais nous ne sommes pas un Hood bis ou quelque chose comme ça. Nos influences sont maintenant digérées, et nous nous rapprochons de certains de ces artistes par certains aspects uniquement. Pour aller vite, nous pourrions dire que nous avons le côté dépouillée de Mark Hollis, la mélancolie de Hood, le chant bas d'Arab Strap. Aujourd'hui, je pense qu'avec le nouvel album sur lequel nous travaillons (qui sera certainement prêt au printemps), nous arrivons à proposer une musique originale qui se démarque pas mal de nos influences premières et de ce qui se fait actuellement. L'enjeu principal d'Immune jusqu'à présent était de composer une musique qui mêlerait pop organique et musique électronique de manière inédite. Beaucoup de groupes proposent ce genre de mélange, mais disons qu'il me semble que nos dosages ne sont pas les mêmes que les autres, et de ça, entre autres, naît notre originalité.

Vous décrivez votre musique comme de l' " electro-pop somatique ". L'expression m'intrigue et, pour tout dire, me laisse perplexe. Pouvez-vous nous en dire plus? Est-ce simplement un "genre musical" de plus ou cela implique-t-il un rapport spécifique à votre musique ?

Au départ, le terme " electro-pop somatique " est venu d'une blague de Martin. Souvent quand on nous demandait quel genre de musique on faisait, on ne savait pas trop quoi dire, comment expliquer vraiment. Mais heureusement, Martin face à ce problème de premier ordre, nous a sauvés en trouvant cette petite formule ! Désormais quand on nous demande " Quel genre de musique vous faîtes ? ", on peut répondre fièrement, de manière pédante et digne " De l'electro-pop somatique ! ". Mais au-delà de la blague, on a conservé le terme, car il intriguait pas mal les gens, et suscitait en eux la curiosité. D'ailleurs, pas mal de webzines qui ont chroniqué notre disque ont repris ce terme. De plus, l'expression " electro-pop somatique " définit assez bien notre musique : parce qu'elle contient nos aspirations (electro et pop), mais aussi parce que la particule "somatique" en dit pas mal long sur le caractère limite endormant de notre musique ! "Soma" se réfère au corps, au corps mort, au corps endormi. Electro-pop somatique signifie donc en gros : electro-pop planante, rêveuse, propice à l'état de veille. Ce n'est pas un nouveau genre, mais juste une manière de mieux définir notre musique rapidement, et de susciter l'intérêt. Pour notre recherche de label pour notre nouvel album, je pense d'ailleurs mettre en avant cette étiquette qui à mon avis est à notre avantage. Mais nous ne créerons pas de dogme en 10 points sur ce qui définit une musique dite " electro-pop somatique ", même si cela pourrait être très drôle !

Il y a donc deux tendances dans votre musique. À mon sens, elles vont jusqu'à créer une forme de tension entre des éléments "pop" et d'autres plus "expérimentaux", tension qui se remarque d'ailleurs nettement dans un morceau comme " Father's Falling ". Je mentionne " Father's Falling " parce qu'on y a l'impression que ces deux types d'éléments (pop vs. expérimentaux) y sont nettement distingués comme pour souligner le thème de la chute. Cela semble indiquer que le "mélange" que vous recherchez n'est pas nécessairement de l'ordre de la synthèse…

La tension dont tu parles est née naturellement, et c'est du coup assez difficile d'en parler. Quand nous composons et arrangeons un morceau, nous ne cherchons pas forcément à créer une telle tension. En général, nous écoutons les prémices du morceau, et au gré de ce qui nous passe par la tête, nous venons y ajouter une note de clavier ou un son que l'on imagine bien coller au morceau. Quand on arrange un morceau on recherche avant tout une sorte de beauté et d'harmonie. S'il n'y a pas de synthèse entre éléments "pop" et d'autres plus "expérimentaux", on peut peut-être plus parler d'harmonie, dans le sens où ce qui nous importe c'est d'établir un certain équilibre, créer un paysage sonore original et cohérent. Nous sommes expérimentaux seulement dans le sens où nous tentons de faire de la pop avec des instruments, des rythmes bricolés ou des sons.

Tu mentionnes un côté "dépouillé" de votre musique. Ce côté dépouillé, ou épuré, est assez sensible. Comment êtes-vous parvenus à l'obtenir ? Est-ce quelque chose qui vous vient naturellement lorsque vous jouez ensemble ? Est-ce quelque chose qui demande un travail spécifique au niveau de la production ?

Pour commencer, nous ne composons jamais tous ensemble. De 2001, date à laquelle Immune s'est formé, jusqu'à l'automne dernier, nous nous étions vu tous ensemble 3 ou 4 fois ! Pendant ces 3, 4 ans, nous fonctionnions un peu à la manière de Labradford. La création d'un morceau se déroulait en gros, en 3 temps. 1/ Je commençais un morceau seul dans mon coin (à Dijon ou à Lyon), en posant les fondations (rythmes, mélodie principale, ligne de chant), 2/ Martin me rejoignait à Dijon pour définir la structure du morceau et pour l'arranger, 3/ Puis seulement après, Gary venait me rendre visite à Dijon ou à Lyon pour poser sa voix sur le morceau, rechantait la ligne de chant que j'avais faite ou en trouvait une autre. Le premier album " Immune " s'est déroulé comme ça pour la plupart des morceaux du disque (excepté pour " Hundred leaves " qui est quasi entièrement un morceau de Martin).
Le côté dépouillé de l'album est né sans doute de cette manière de faire où tout s'est fait par petites touches successives. Quand j'apportais un morceau à travailler à Martin, nous ajoutions ses parties (arpèges, ondes de guitares, sons, etc.) avec parcimonie, avec le souci du détail. Martin et moi voulions ouvertement privilégier l'épure et le dépouillement au sein de nos morceaux. On ne voulait pas en faire trop. On recherchait à ajouter juste ce qu'il fallait et pas plus. Aujourd'hui, par rapport à tout ça, nous sommes un peu en mutation, car le fait de jouer sur scène pour la première fois depuis cet automne a changé un peu la donne. Désormais, Gary et Julien sont plus impliqués dans le groupe qu'auparavant, et nous fonctionnons de plus en plus comme un "vrai" groupe. Même si Martin et moi sommes toujours un peu les piliers d'Immune du fait que c'est principalement nous qui écrivons les morceaux du groupe, Gary trouve désormais ses lignes vocales seul, Julien se met à composer, et les deux ont une place plus importante dans nos choix artistiques. Mais le côté épuré et dépouillé demeure encore aujourd'hui dans nos nouvelles compositions, même si c'est peut-être dans une moindre mesure. Nous tenons à rester sur la tangente plutôt que de tomber dans la "surexpression".
Au niveau de la production, nous cherchons à conserver un son assez fin, qui ne soit pas "boosté". Nous ne sommes pas en recherche d'un gros son. Nous aimons notre son, fait à l'ordinateur chez nous. Le côté artisanal reste pour nous important. Le caractère, la spécificité du son sont des éléments aussi importants que la composition ou l'originalité d'un son de guitare. Nous aimons tout pouvoir contrôler, de la composition à la production, maîtriser notre son.

Le home studio semble constituer pour vous le modèle du travail d'enregistrement ? Pourrait-on ainsi parler d'une certaine "idéologie" du home studio (même si le terme "idéologie" est peut-être un peu fort) comme un moyen d'échapper au formatage croissant de la production musicale ?

C'est vrai que le home studio est un peu pour nous un modèle de travail. Toutes les phases de création apparaissent pour nous en même temps, et s'enregistrer à la maison permet de ne pas faire de distinction entre ces phases souvent scindées : 1/ la composition, 2/ l'enregistrement, 3/ le mixage. Par exemple, l'enregistrement et le mixage apparaissent dès le stade de la composition et ça, c'est l'une des chances qu'offre le home studio. Il n'y a pas réellement de démos de nos morceaux. Bien souvent, la plupart des éléments enregistrés au stade de la composition demeurent au mixage final, sauf si le son et l'interprétation sont trop mauvais.
Le grand avantage du home studio, c'est aussi que l'on enregistre quand on a envie. En général, on ne fait pas de réelles séances d'enregistrement - sauf quand il le faut, comme en ce moment où nous réenregistrons ce qui sonne mal. Tout fait se naturellement, et s'insère totalement dans notre quotidien, et nous aimons ce mode de fonctionnement.
Et puis le troisième grand avantage, c'est que nous contrôlons totalement notre son. De A à Z, nous prenons toutes les décisions, et c'est un bon moyen d'échapper au formatage dont nous pourrions être victimes si nous passions par un studio. Nous ne sommes pas contre le fait d'aller en studio, bien au contraire, mais nous n'en sommes pas là pour l'instant. Pour l'instant nous désirons maîtriser totalement notre son, avant de soumettre nos morceaux à quelqu'un d'extérieur. À l'avenir, l'expérience sera intéressante, mais pour enregistrer en studio, il faut du temps, et donc de l'argent pour travailler correctement, et nous n'en avons pas ! Mais nous ne nous débrouillons pas trop mal seuls, même si nous sommes par exemple contraints de mettre plus de boîtes à rythme sur le disque parce que l'on a pas le matériel pour enregistrer une batterie. Mais le côté artisanal de nos enregistrements nous plaît bien, et ça nous force à être peut-être plus inventifs. Nous n'enregistrons pas de manière académique, et je pense que ça se ressent sur certains morceaux. Par exemple, nous enregistrons directement les guitares sans passer par des amplis, les captations de batterie se font par un vieux micro de caméra super-8. Petit à petit, on a trouvé des techniques qui nous sont propres et que l'on arrive à bien maîtriser. Je ne sais pas si on peut vraiment parler d'une "idéologie" du home studio, mais ce modèle d'enregistrement nous plaît beaucoup !

Vous êtes actuellement en période d'enregistrement. À quoi ressemblera votre prochain album ? Dans quelle direction vous orientez-vous ? Sans le dévoiler, peux-tu nous dire quelles seront les différences notables par rapport au premier album ?

En fait, nous sommes en train d'enregistrer le dernier morceau de l'album, mais nous sommes actuellement plus dans une phase de mixage. Martin et moi avons quasiment terminé le mixage des 12 autres morceaux. L'album que nous préparons sera notre deuxième disque, et notre premier véritable album, étant donné que le précédent atteignait à peine les 40 minutes. Cet album comprendra 13 titres dont 5 tirés du premier disque - mais un peu remaniés - et 9 nouveaux. Ce sera une sorte de compilation des meilleurs morceaux que l'on a composés depuis nos débuts. Le "very best of" d'Immune ! Ce disque sera aussi beaucoup plus diversifié que le précédent. Il contiendra des morceaux plus pop, plus rythmés, plus intenses, mais on retrouvera aussi le côté plus expérimental, mélancolique, plus froid d' " Immune ". Cette synthèse me paraît bonne, et met bien en valeur l'originalité de chaque morceau. Ce disque sera vraiment pour le coup " electro-pop somatique ", les nouveaux morceaux correspondant bien à cette étiquette. Dans l'ensemble, les 9 nouveaux titres sont plus ouverts dans tous les sens du terme. Nous nous sommes un peu plus lâchés, et n'avons pas eu peur à certains moments d'aller vers des choses plus expressives et plus lyriques. Je suis vraiment fier de l'album que nous sommes en train de faire, et nous espérons bien cette fois trouver un label !
Mais, nous pensons déjà à une suite, un album plus sombre et plus acoustique, voire jazzy, mais nous n'en sommes pas là. Entre temps, nous allons enregistrer un mini album quasiment entièrement composé au piano. Tous les morceaux sont composés, donc normalement tout ça ira vite.
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Merry Go Round (novembre 2004)
Interview de Jean-Sébastien

Dans les nuages.

Entre électronique organique et guitares éthérées, Immune construit sur son premier album un univers enclin à la rêverie tendre et au spleen nocturne. Sept titres qui pourraient annoncer une belle éclosion sonore pour l'avenir. A suivre donc.
[ interview : Gaylor Olivier / photo : D.R]

Des photos sépias d'un enfant illustre votre disque. Te souviens-tu des images, sons ou musiques qui ont bercé ton enfance ?

Jean-Sébastien Nouveau : Il y avait toujours de la musique chez moi quand j'étais petit. Mon père était musicien et passait beaucoup de rock progressif : Genesis, Yes, King Crimson,... Mais je me souviens davantage de son matériel, de ses vieux claviers, de son 8-piste que j'ai réutilisés ensuite quand j’ai commencé à composer. J'ai été aussi pas mal bercé par le super-8, par les vieux films de vacances que l'on regardait en famille occasionnellement. De ce fait, j'ai toujours été un peu absorbé par les vieilles images, les vieux sons. J'aime leur grain, leur texture, leur mélancolie.

Est-ce justement cette ambiance familiale qui t’a amené à faire de la musique ou est-ce un/des disques qui ont été le déclencheur ?

L'ambiance familiale y a été certainement pour quelque chose... Mais je ne sais pas trop dans quelle mesure exactement, et de quelle manière ça m'a influencé. Je n'ai pas vraiment de souvenir de disques qui m'ont amené à faire de la musique. J'ai commencé assez naturellement en fait à me mettre à faire de la musique, peut-être même avant d'en écouter. J'ai pris quelques cours de piano enfant, et j'ai commencé comme ça... Mais je me suis mis à écouter vraiment de la musique qu'au collège. J'écoutais surtout Nirvana et des groupes plus pop-rock comme Oasis, les Smashing Pumpkins, Cure,... Ce n'est qu'au lycée que mes goûts se sont affinés, et où j'ai découvert les groupes qui sont devenus "phares"pour moi. Il y a eu l'achat de quelques disques qui m'ont vraiment marqué : second de Tindersticks, Ok Computer de Radiohead, et surtout les disques de Hood à l'époque où Matt Elliott collaborait avec eux. Et puis j'ai découvert la musique de Labradford, des Rachel's...
Ma culture musicale s'est alors pas mal fondée par le post-rock. J'aimais la musique calme, mélancolique et minimaliste.

Comment as tu rencontré les autres membres d'Immune ?

J'ai d'abord rencontré Martin au collège, mais on ne se connaissait pas trop. Juste de temps en temps on parlait un peu musique : d'Oasis, de Suède, de Nirvana, de ce qu'on aimait à l'époque. Et puis on s'est perdu un peu de vue un moment avant que l'on se recroise plusieurs fois à la Fnac à chercher les mêmes disques. Très vite on s'est mis à se voir et à passer des après midi entières à jouer This is a lie de Cure... On a rencontré Gary bien après, lorsque l’on projetait de faire des concerts. Je venais juste de terminer un premier disque en solo sous le nom de "Yawn". Mais vu que je ne voulais pas chanter devant des gens, j'ai alors cherché un chanteur, et un ami m'a présenté Gary. Puis ce n'est que récemment que mon frère nous a rejoint.

Pourquoi ne souhaitais-tu pas chanter sur Immune ? Ce qui n'était pas le cas pour ton projet solo Yawn justement.

Disons que les choses se sont faites assez naturellement. J’ai découvert la voix de Gary, et je l’ai adoré. Il est devenu le chanteur d’Immune ainsi. C’est à ce moment aussi que Martin est rentré pleinement dans le processus. Il faut dire aussi que je ne chante pas vraiment, je bredouille plus qu'autre chose à la manière un peu du chanteur d'Arab Strap. Je serais incapable de chanter pleinement, et je serais trop timide pour le faire en concert. Cela dit, j'ai chanté un morceau sur le premier album, et sur le second que nous préparons, j'en chanterai deux. Mais en concert Gary chante tout, je ne veux pas m'exposer.

Votre musique mêle électronique et instrumentation plus classique. Comment êtes vous arrivés à utiliser des machines?

Dès le départ, nous avions le désir de créer une musique organique qui mêlerait instrumentation classique et électro. Mais le mélange s'est créé assez naturellement en fait. On a toujours travaillé en essayant de construire une musique qui marierait les deux. Avec notre premier disque, on a été dans ce sens, mais je pense que cet aspect est encore plus essentiel sur les morceaux que nous travaillons actuellement. Quand nous travaillons un morceau, de plus en plus nous tentons de nous appliquer à trouver les bonnes associations de matières sonores. Un son électro peut par exemple donner un meilleur éclairage à un morceau acoustique. Dans un morceau, nous nous intéressons autant aux mélodies qu'au son. Pour chaque morceau on essaie de construire un espace où les différentes strates de sons se mêlent.

La mélancolie, le calme. Cherchez vous à toucher à travers votre musique une certaine forme de beauté, de tendresse?

Oui. On ne fait que rechercher une sorte de beauté ! Et cette beauté se trouve pour nous dans la mélancolie et la douceur. A chaque fois nous cherchons à créer une sorte d'harmonie (dans les sons, dans les mélodies, ...) de laquelle une beauté peut naître. Pour ma part, Mark Hollis, Bed sont ceux qui se rapprochent le plus de la beauté comme je l'envisage.

Tu le considères comme un maître à penser Mark Hollis ?

Oui, d'une certaine manière. Disons que j'ai une très grande admiration pour lui. C'est l'un des rares artistes que je connais qui ne s'adapte pas aux modes, et qui continue dans la voie qu'il s'est fixé avec une réelle intégrité. Sa musique me passionne, mais jamais je me sentirais capable de suivre le même genre de chemin que lui. Je suis moins rigoureux, et j'ai besoin d’essayer de nouvelles voies. Lui ne cherche rien, il trouve. Là où l'on cherche dans différentes directions, lui creuse la sienne en s'y limitant. Ethiquement en art, Mark Hollis est un maître à penser. Il me fait un peu penser à Tarkovski dans sa démarche et dans sa rigueur. Ce sont des gens qui considèrent que créer ne se limite pas à produire un album tous les ans. Ils ne sont pas dans une logique économique, et considèrent que l'artiste est chargé d'un devoir, d'une mission. Pour eux, un artiste ne crée pas des produits pour répondre à des besoins, mais propose à travers ses oeuvres de nouvelles valeurs qui peuvent enrichir l'Homme spirituellement, et changer son rapport au Monde. Bien sur, Immune ne se situe pas dans cette lignée ! Il y a sans doute certaines connexions à faire entre ces artistes et nous, mais nous, nous sommes plutôt des artisans que des artistes.

Vous qualifiez votre musique d'electro pop somatique. Une façon de devancer la presse dans ses rangements à cases ?

C'était avant tout une blague de Martin au départ. On ne comptait pas utiliser cette qualification pour présenter notre musique. On la trouve assez ridicule en fait, mais quand on a commencé à définir notre musique ainsi quand des gens nous demandaient ce que l'on faisait, en général ça les titillaient, ça les interpellaient, et ils aimaient bien. Alors on a conservé cette qualification, même si je ne suis toujours pas convaincu de son impact sur les gens. Pour ma part, je verrais ça dans un magasin, je me méfierais, je me demanderais "qu'est ce que c'est encore que ce pseudo genre?". Par rapport à la presse, je crois que ça leur plait assez. On a juste glissé le mot electro-pop somatique une fois dans notre dossier de presse, mais pas mal de chroniqueurs le reprennent. Si c'est un bon moyen de se faire remarquer, on l'utilisera plus ouvertement.

Dans quel état d'esprit avez vous abordé l'enregistrement de Immune ?

Notre manière d'enregistrer et de composer est assez spéciale. Nous fonctionnons un peu comme Labradford. Martin habite Paris, Gary est à St Claude dans le Jura, mon frère Julien est à Dijon, et moi je suis à Lyon. Jusqu'à il y a à peu près trois mois, nous ne nous étions vu tous ensemble que 2 ou trois fois. En général, j'enregistre les bases d'un morceau, je vois ensuite Martin qui trouve des motifs et avec qui je définis une structure, et pour finir je vois Gary qui vient greffer sa voix sur le tout. Pour l'album, de par ce fonctionnement, il n'y a pas eu réellement "d'état d'esprit" dans lequel nous avons travaillé. Généralement, les morceaux se créent au quotidien. Nous enregistrons tout chez moi sur toute l'année. Composition et enregistrement sont souvent mêlés. Quand je travaille sur un morceau, la démo peut devenir la version définitive. Tout cela est très artisanal et très quotidien.
L'album s'est dessiné progressivement avec l'envie juste de créer les morceaux les meilleurs possible. Mais sur le second album, -qui nous espérons trouvera cette fois un label- nous allons reprendre certains morceaux de ce premier disque pour avoir un album dense, riche de différentes ambiantes. Sur ce nouvel album, j'essaie de faire en sorte que chaque morceau représente à lui seul un projet.

Vous travaillez déjà sur une suite ?

Notre deuxième album est déjà enregistré. Nous n'avons plus qu'à mixer et à masteriser le tout. Nous avons conservé 5 morceaux de notre premier disque, et nous en avons composé 6 nouveaux. Pour nous c'est une sorte de compilation de tout ce que l'on a fait de mieux depuis notre formation. Pour notre recherche de label, nous tenons à servir le meilleur de ce que l'on a pu faire pour mettre toutes nos chances de notre côté. Mais on a beaucoup d'autres projets en tête. On projette de réaliser un album uniquement composé au piano avec un vieux magnétophone. On envisage de travailler aussi à l'avenir sur des morceaux plus ouvertement pop, dans une lignée d'artistes comme Sparklehorse, Mojave 3,... mais ce ne sont que des projets, nous verrons bien comment naturellement nous évoluerons.

Est-ce que le fait de ne pas avoir trouvé de label pour sortir Immune vous a renforcé dans vos choix artistiques justement?

C'est difficile à dire... Je pense que petit à petit on s'ouvre davantage. Nous n'avons pas du tout l'envie de rester clôturé dans le monde de la musique indé réservée aux "connaisseurs". Je pense que de plus en plus on arrive à assumer notre côté pop, que l'on rejetait auparavant. On a envie de faire plaisir, là où parfois on a pu se brimer. Je ne sais pas trop dans quelle mesure le fait de ne pas avoir trouvé de label nous fait évoluer... ça doit certainement jouer. Beaucoup de labels ont vraiment aimé notre musique, et surtout en Angleterre et aux Etats Unis. Les labels français ont été assez peu enthousiastes par rapport à eux. Après rien n'a vraiment débouché avec eux non plus... Il n'y a que le label hollandais Zabel Muziek qui nous a contacté pour réaliser un cd split 4 titres avec le groupe Ex-Con. Nous ne le connaissions pas, mais ils nous ont envoyé leur disque, et j'ai pour ma part été enchanté par leurs morceaux. Après nous ne tenons pas du tout à nous autoproduire, mais s'il faut en passer par là, nous le ferons.
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